lundi 22 décembre 2008

Petit bréviaire de la novlangue

Bréviaire de la novlangue

Dans vos communications professionnelles, vous utilisez certainement les termes classiques que la belle et riche langue de Molière met à votre disposition pour exprimer avec exactitude le fond de votre pensée. Eh bien vous faites certainement partie des has-been - oups excusez, des survivances paléontologiques à dater au carbone 14 - de notre société moderne du vingt et unième siècle. En un mot, vous êtes obsolète. Autant dire quasi mort - ce que vous devriez avoir l'ultime élégance de devenir à ce stade.

Etant dans un jour de grande bonté, je vous fourni ci-après LE vocabulaire à retenir et employer de toute urgence dans les différentes communications et conversations, surtout dans le cadre de votre profession. Vocabulaire qui vous classera automatiquement parmi ceux dont le jugement fait autorité et vous extraira de la foules des vulgus pecum vautrés dans la fange de l'ignorance crasse et tout justes bons à servir de néo-esclaves à la classe des prédateurs des temps modernes.

N'ayez pas peur d'user et d'abuser de ces mots dans vos phrases, y-compris si celles-ci aboutissent à un résultat dénué de sens. L'important étant de pouvoir faire comprendre à vos interlocuteurs que vous faites partie de la caste des gens éduqués, voir des grands leaders charismatiques.

Il est d'ailleurs inutile de postuler à un emploi dans le marketing - oups "marquetique" - ou la communication si vous n'êtes pas capable de placer un seul de ces mots par phrase que vous prononcez.

Voici parmi les plus célèbres en vrac, étant pris d'une soudaine crise de flemme de tri alphabétique au moment d'écrire ces lignes :

• Problématique (nf.) - je ne suis pas sûr de l'orthographe, ce mot ne figurant pas dans mon dictionnaire. Terme à employer impérativement en lieu et place de "problème".

• Exhaustif (a.) : Utilisez impérativement cet adjectif en lieu et place de "complet".

• Solutionner (v.) : Le Français propose déjà le verbe "résoudre", mais l'utilisation de "solutionner" vous permet de noircir plus de papier ou de susciter l'admiration de vos interlocuteurs/lecteurs une seconde de plus.

• Brain storming (nm.) : Non, ce n'est pas un tempêtage de cerveau, mais ce que les gueux appellent une scéance de réflexion collective.

• Proactif (a.) : Adjectif fourre-tout pour désigner une personne ou un service diantrement à l'écoute de ses clients et apte à précéder ses désirs. S'utilise en lieu et place de "vigilant" ou "serviable" mais sans pour autant faire passer la personne à laquelle cet adjectif est accolé pour un larbin, mais qui n'en est pas moins un.

• Benchmark (nm.) : N'utilisez plus le terme "évaluation" devenu si désuet. Le terme "benchmark" est fait pour vous. A noter également le verbe "benchmarker".

• Créatif (nm.) : Tarlouze pistonnée et généralement cocaïnomane d'une agence de pub (sur) payée pour vendre - à prix d'or - les croûtes réalisées par les graphistes stagiaires. Le principal talent du créatif étant la maîtrise parfaite d'un vocabulaire "novlangue" bien plus riche que celui exposé dans ces lignes. A ne pas confondre avec l'adjectif "créatif" qui conserve son sens académique.

• Communiquant (nm.) : Individu passé maître dans l'art de déployer les rideaux de fumée. Le communiquant est généralement poussé en avant pour enrober les mauvaises nouvelles de termes positifs. Comme le créatif vu ci-avant, le communicant ne sait pas faire deux phrases sans placer au moins un mot de novlangue, c'est une seconde nature chez lui.

• Valeur ajoutée (nf.) : Se dit pour qualifier un produit ou un service pour justifier une facture salée, la valeur étant généralement ajoutée uniquement à la dite facture.

Je ne suis pas encore un pro comme le communiquant ou le créatif (voir ci-dessus) mais à la lumière du petit glossaire exposé ci-avant, vous êtes en mesure d'écrire ceci :

"Nous avons élaboré un benchmark pour solutionner de façon exhaustive votre problématique, à la suite d'un brain-storming réunissant nos communicants et créatifs les plus proactifs."

Ca a de la gueule ça. Même si c'est pour raconter à votre client qu'on a fait plancher des besogneux qui n'ont pas été foutu de trouver une solution juste avant de déployer le rideau de fumée.

Merci Gillux. Dire qu'avant la lecture de cet article vous auriez écrit une niaiserie aussi sexy qu'un matériel agricole soviétique des années soixante du style :

"Nous avons évalué les diverses solutions à votre problème lors d'une séance de réflexion réunissant nos consultants les plus inventifs".

Comme écrit plus haut, cette petite liste n'a pas la prétention d'être complète. Pour ceux et celles qui ont envie d'en connaître plus, je recommande la lecture des sites Web traitant de marketing, de stratégie d'entreprise, ainsi que l'excellent émission "La vie des media" sur TF1 où vous pourrez entendre les formules les plus croustillantes du domaine.

vendredi 14 novembre 2008

Du vécu

Du réchauffé même car 1000 versions de cette blague - plutôt triste d'ailleurs - circulent sur la toile. Mais tellement d'actualité dans notre cher Franchouillistan que je ne résiste pas à l'envie de poster ceci, étant actuellement rameur dans une situation similaire.

Deux entreprises, dont une de notre pays, décident de faire une course d'aviron dans le but de montrer leur savoir-faire dans le domaine de la galvanisation des troupes.

Les deux équipes s'entraînent dur.

Lors de la première épreuve, les étrangers gagnent avec plus d'un Kilomètre d'avance.
Les nôtres sont très affectés. Le management se réunit pour chercher la cause de l'échec. Une équipe d'audit constituée de seniors managers est désignée. Après enquête, ils constatent que notre équipe, qui est constituée de dix personnes, n'a qu'un rameur, alors que l'équipe étrangère comporte un barreur et neuf rameurs.

La direction décide de faire appel au service de consultants internes. Leur avis, entoure de précautions oratoires, semble préconiser l'augmentation du nombre de rameurs. Après réflexion, la direction décide de procéder à une réorganisation.Il est décidé de mettre en place un manuel qualité, des procédures d'application, des documents de suivis...Une nouvelle stratégie est mise en place, basée sur une forte synergie. Elle doit améliorer le rendement et la productivité grâce à ces modifications structurelles. On parle même de zéro défaut dans tous les repas de brainstorming. La nouvelle équipe constituée comprend maintenant:

  • 1 directeur général d'aviron
  • 1 directeur adjoint d'aviron
  • 1 superviseur d'aviron
  • 1 consultant de gestion d'aviron
  • 1 contrôleur de gestion d'aviron
  • 1 charge de communication d'aviron
  • 1 coordinateur d'aviron
  • 1 barreur
  • 1 rameur

La course a lieu et notre équipe à 2 kilomètres de retard. Humiliée, la direction prend des décisions rapides et courageuses : Elle licencie le rameur n'ayant pas atteint ses objectifs, vend le bateau et annule tout investissement.
Avec l'argent économise, elle récompense les managers et superviseurs en leur donnant une prime, augmente le salaire des directeurs et s'octroie une indemnité exceptionnelle de fin de mission.

Well, une caricature, bien sûr, mais une caricature n'est qu'un exagération d'un phénomène bien réel.

mardi 27 mai 2008

Petite obscénité en passant


De quoi te plains-tu piétaille ? Ton pouvoir d'achat dégringole ? Bien fait pour ta gueule ! T'avais qu'à mieux choisir ton métier.

Moi, ça va, j'ai pas à me plaindre (âmes sensibles, cocus professionnels, fauchés éternels s'abstenir de cliquer).

Si tu veux améliorer ton pouvoir d'achat, il te suffit d'écouter les judicieux conseils de Christine Lagarde.



Je me demande toujours comment elle a fait pour ne pas être prise de fou rire. Je n'aurais pas pu me retenir à sa place.

Accepte néanmoins mes excuses pour tout le vomi que la lecture du lien ci-dessus a pu projeter sur ton clavier.

samedi 10 mai 2008

Le grenelle de l'environnement


Afin de faire un gros raffut médiatique vert délavé, not' bon sarkomaître a sorti de son chapeau magique le Grenelle de l'environnement. Une bonne grosse commission de sages (et certainement d'énarques vu le style de la prose produite) comme notre belle république de l'ex-camembert au lait cru les aime (*).

Cher lecteur, tu pourras lire la prose pondue par la dite commission sur son site http://www.grenelledelenvironnement.fr/ . Je sais, le style littéraire utilisé vous donnera rapidement l'impression de lire les plus beaux chapitres des dernières éditions du journal officiel, quelques jolies couleurs en plus. Il te sera donc certainement difficile de lire tout ceci sans plonger dans une certaine somnolence et nécessitera donc une augmentation de ta dose quotidienne de caféine. Mais comme l'exercice mon métier m'a entraîné à lire - et comprendre, si, si ! - les plus hauts sommets de la littérature technocratique, j'ai pu en extraire la substantifique moelle.

Après énumération des mesures préconisées, et attendues - on n'interdit pas de polluer, on fait payer le droit de polluer - j'y ai remarqué deux omissions criantes parmi les thèmes abordés et mesures préconisées

Je passe en revue la conclusion du grenelle de l'environnement et remarque deux absents de marque :

  • La diéselodépendance du parc automobile du franchouillistan
  • La promotion du télétravail

Seul le CO2 pollue !

Oui, le seul critère de pollution retenu pour les véhicules à moteur thermique est le poids de CO2 par kilomètre parcouru. On éxonère ainsi le diésel des autres critères de pollution et plus particulièrement des particules de suie et du soufre qui sortent des pots d'échappement des véhicules consommant du gazole.

Dans de nombreux pays, le gazole est plus cher à la pompe que l'essence sans plomb, dans d'autres, le diesel est interdit pour les véhicules individuels. Mais dans notre beau pays bananier, on ne se fâche pas avec les lobbies, Le poids des lobbies a la vie dure dans notre belle ripoublique qui révèle en cela son côté bananier.

Et le télétravail, il refoule du goulot.

Alors là, c'est quelque-chose que je n'ai pas capté. Dans un pays où des centaines de milliers d'actifs doivent perdre deux heures par jour dans les embouteillages, passer leur première heure de travail pour gagner de quoi financer les deux heures vues plus haut, et gratifier la planète de quelques tonnes de CO2 et autres suies vomitives vues plus haut.

Ya pas un expert de la commission qui a émis, même timidement l'idée, que les entreprises ne sont pas encouragées à recourir plus massivement au télétravail, lorsque le poste est compatible avec l'éloignement physique du salarié ou prestataire.

La France fait partie des pays les mieux équipés au monde en terme d'infrastructures Internet, et le prix mensuel de l'abonnement ADSL avec n'est rien comparé avec la part du coût locatif pour une personne dans un immeuble de bureaux.

Chapeau bas. La pollution a encore de l'avenir, du moins avec des mesurettes comme celles retenues par notre belle commission que le monde entier nous en envie.

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(*) "Quand on veut noyer un problème, on nomme un commission" - George Clémenceau

lundi 4 février 2008

L'édulcorant est passé sur le poids des mots


Ca couvait déjà depuis déjà quelques temps, beaucoup d'entre toi, cher lecteur, se souvient certainement des cris d'orfraie et des procès en fascisme rampant qui avaient accueilli Michel Rocard lorsqu'il nous avait confié que "La France n'a pas pour vocation d'abriter toutes les misères du monde".

Ca a continué lorsque Chevènement a osé, l'ignoble, traiter de sauvageons les représentants de notre belle jeunesse qui participent à l'expansion de l'économie nationale par le renouvellement du parc automobile, qui ont la bonté d'initier les jeunes filles aux joies des rapports sexuels - anals de préférence - à l'insu de leur plein gré et finissent la journée par un caillassage en règle des pompiers qui ont l'outrecuidance de vouloir couper le chauffage des plus démunis par recyclage pyrotechnique direct des ordures ménagères.

On a eu droit il y a quelques années au pamphlet mou de Daniel Lindenberg qui a cru bon intégrer les penseurs et écrivains parmi les plus brillants dans la catégorie "réactionnaire", tous accusés de ne pas se plier au dogme très en vogue de la pensée unique démocratiste (attention, je n'ai pas écrit "démocrate"). Est réactionnaire tout outrecuidant pensant que la démocratie est un système politique imparfait et devant s'enrichir de sa propre critique.

Mais maintenant, et plus particulièrement depuis que not' bon président Sarko, roi des média complaisants, ben... est not' président, la bien-pensance se déchaîne sans la moindre vergogne sur tout et surtout sur rien, quelques mots parfois.

Le ponpon est tout particulièrement décroché - chapeau bas - par nos cher militants qui ont squatté les blogs de Libé et qui ont osé - de par leur prise de position dans leurs blogs - se comparer aux résistants et autres combattants de la libération tout en comparant le pouvoir en place à celui qui a gouverné les "heures les plus sombres de notre histoire" (tm). Il est notoire que de nos jours, publier des propos sarkophobes sur un blog "résistant" vous fait encourir le peloton d'exécution après bien entendu le passage à la salle de torture.

Maintenant, plus aucun politicien ou même homme public, fût-il bien intentionné ne peut prononcer le mot "détail" sans entendre hurler au lepénisme nos chiens de garde du langage public bien pensant rasé de près et estampillé conforme à l'éthique humaine. Ne parlons pas du terme "ADN" que les désopilants gagmen de Libé ont cru bon de renommer "ADHaine", comme "FHaine".

Grâce soit donc rendue à tous ceux et celles, qui grâce à leur sens de la nuance, de la subtilité, de la mesure dans l'emploi de leurs mots ont réussi à rendre quasi inoffensifs des mots comme "fascisme", "nazisme", "rafle", "déportation", "torture", "terreur" (...)*. Mots que l'on peut désormais utiliser aussi bien pour Rachida Dati ou Brice Hortefeux que pour Pol Pot ou Hitler sans la moindre vergogne ni arrière pensée.

Il est inutile de conclure que ceux qui terminent ces lignes en pensant que l'auteur de ces lignes est un réac sarkobushiste hystérique n'ont absolument rien compris à la teneur de ces lignes. Bon, je l'ai quand même conclu mais je ne pouvais pas y résister. Il s'agit juste d'une sorte de cri de désespoir à l'écoute des "arguments" et vocabulaire de ceuzécelles proches de mon camp politique grâce auxquels la gauche ne risque pas de revenir un jour aux affaires sans gaffe ou échec énorme de la majorité actuelle. Le pouvoir en place ne les en remerciera jamais assez.




(*) Je te laisse le soin, cher lecteur, de remplir les points de suspension en répondant à ce billet.